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Un air de répétition (psychopathologie du confinement 3)

22

mai

Débacle

Il y a dans le récit de la débâcle qu’a connu la France en mai 1940, et sans convoquer de façon excessive le « démon de l’analogie » cher à Edgar Poe, une impression actuelle de répétition.

La défaite française était en grande partie due à l’impréparation, à la sous-estimation de la puissance de l’armée allemande, aux conceptions militaires de généraux qui n’avaient pas dépassé la guerre de 14-18 et aussi aux jeux sans fin des parlementaires de la 3ème république s’amusant à faire tomber les uns après les autres les ministères.

On reprochera sans doute ultérieurement au gouvernement actuel son impréparation ou au moins la sous-estimation d’une épidémie qui a pendant de longues semaines été banalisée. Devant ce qui se passait en Chine, le « virus chinois » a été traité avec mépris et le confinement mis en place par le gouvernement chinois considéré avec hauteur, sinon condescendance (le ridicule de ces asiatiques avec leurs masques vissés en permanence sur la figure). Si l’on passe sur la démission scandaleuse, à l’orée de cette crise, d’une ministre de la santé qui abandonne le navire dans la tempête, il semble qu’on ne se soit guère soucié de recenser le nombre de masques disponibles, de gels hydroalcooliques, de vêtements de protection pour le personnel de santé, voire de ventilateurs et autres matériels de réanimation pour les hôpitaux, en vue de ladite tempête. La crise majeure subie par nos voisins transalpins a d’abord été mise sur une sorte de « bordel italien » dont la péninsule serait coutumière et n’a guère inquiété, pas plus que le décès pourtant préoccupant à 34 ans, d’un des premiers médecins à avoir alerté sur la gravité de l’épidémie naissante à Wuhan.

Nous avons maintenu aussi dans cette affaire, une conception obsolète de l’épidémie, d’abord assimilé à une simple grippe rappelant le risque pandémique de l’épisode H5N1 de 2008 où l’on a beaucoup reproché à Mme Bachelot, alors au poste occupé naguère par Mme Buzin, d’en avoir trop fait, et d’avoir crié au loup face à un chihuahua.

Enfin, la classe politique dans son ensemble, toujours soucieuse de faire fructifier son petit commerce, a souhaité le maintien d’élections municipales dont il était à peu près certain qu’elles ne pourraient être poursuivies, quitte le lendemain de cette « mascarade », à prendre un air grave dans les médias en arguant qu’un message de confinement, suivi d’un encouragement à aller voter, plongeaient les citoyens dans la perplexité. Ce qui était parfaitement exact, sauf que tous étaient responsables de la confusion, avec une mention spéciale pour le président de la république qui, pour une fois aurait dû prendre une posture « jupitérienne » à cette occasion, et annuler un scrutin qui n’avait aucun caractère d’urgence, donnant plutôt au confinement la vraie mesure de l’urgence.

Les panzers allemands en mai 1940 ont atteint Calais en 10 jours, pulvérisant tout sur leur passage, et renvoyant l’armée française et ceux qui la dirigeait, au bilan calamiteux de leurs actions pendant les vingt années précédentes. 50 jours plus tard, avec cent mille soldats français tués et de très nombreux prisonniers, la France humiliée capitulait en rase campagne.

Le COVID 19 ne dispose ni de blindés ni de stukas mais ignore tout comme les Nazis, les frontières. Il reste surtout à espérer qu’il fasse moins de dégâts. Car si les murs de nos maisons tiennent encore debout, ce ne sera probablement pas le cas de notre économie. Tout cela doit conduire à un bilan honnête de cette crise et de la responsabilité de ceux à charge d’y faire face, afin d’anticiper la suivante (qui ne sera pas forcément virale).

Un vœu pieux naturellement. « Gouverner c’est prévoir », malheureusement l’Histoire est le long récit de nos imprévoyances.

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